Un
mois après avoir posé le pied sur le sol américain, me voici
arrivé à Chui/Chuy, ville frontière entre le géant brésilien et
le poucet uruguayen.
Ville
étrange que cette zone franche qui s'étire sur cinq kilomètres
entre les deux postes frontière.
L'avenue
au double sens de circulation qui porte le nom des deux pays est
bordée de magasins aux produits non taxés.
Restaurants,
hôtels et supermarchés complètent le décor de ce lieu de trafics
dédié à la consommation.
Je profite du taux de change intéressant pour troquer mes derniers réals contre des pesos uruguayens. Il faudra que je divise par trente ma nouvelle monnaie pour obtenir le prix en euros alors qu'il me suffisait de diviser le real par trois.
En
quittant le Brésil lusophone j'entre dans l'Amérique hispanique. Il
me sera désormais plus facile d'appréhender un monde dont je
connais les rudiments de la langue.
Les flyers sur la côte uruguayenne récupérés à l'office de tourisme sont vite épluchés et les mots inconnus ou oubliés (la « puissance d'oubli » de l'élève chère à une ancienne prof d'espagnol) (re)deviennent familiers grâce au dico.
Les flyers sur la côte uruguayenne récupérés à l'office de tourisme sont vite épluchés et les mots inconnus ou oubliés (la « puissance d'oubli » de l'élève chère à une ancienne prof d'espagnol) (re)deviennent familiers grâce au dico.
Après
quelques kilomètres dans ce nouveau pays, et un passage par la mer à
La Coronilla, la petite montée bien sèche vers la forteresse de
Santa Teresa (témoin des luttes de territoire entre les Empires
espagnol et portugais au 18ème siècle) me fait oublier
ma semaine de plat dans les lagunes.
J'y
gagne un beau petit panorama sur la Laguna Negra cernée par de
petites montagnes et dont les rives sont occupées par de nombreuses
espèces d'oiseaux dont ces nandous à l'allure
nonchalante.
Je
n'y résiste pas. Je n'ai pas beaucoup roulé lors de cette première
étape mais le premier accès vers le lac par une piste de tôle
ondulée fait envie aussi à Paulo qui s'arrête sur une petite butte
couverte d'épineux qui nous cachent de la route et d'où la vue sur
le lac est imprenable.
Premier bivouac. Bienvenidos
al Uruguay.
La
côte est du pays se découvre par une belle route à vélo sans
grande circulation à cette époque de l'année. Soleil et vent qui
pousse : cyclotage obligé.
Petit
village de pêcheurs à Punta del Diablo.
Paysages
de palmiers dont certains sont centenaires, au dessous desquels
paissent vaches et moutons, car la culture gaucho est ici aussi bien
présente.
sous les palmiers les vaches
et la version avec les moutons
Nouvel
accès à la plage à Aguas Dulces, où j'ai un aperçu sur les dunes
du Cabo Polonio.
Le
Cabo Polonio est érigé en Parc National pour protéger dunes et
forêts. Les dunes changent paraît-il chaque jour de visage en
fonction de la direction et de la force des vents.
Après
plus d'un mois sur le nouveau monde, je rencontre (enfin !) mes
premiers cyclotouristes. Christine et Pierre profitent d'un mois de
vacances pour rallier Montevideo à Rio de Janeiro. Itinéraire
essentiellement routier ; il vaut mieux avec leurs roues de 700.
Ils
sont Québécois et trouvent mon vélo bien « loadé » ;
j'adore le mot. Echange sympa avant de reprendre chacun notre route,
eux avec le vent de face.
Le
bivouac sur la plage me tente, mais un panneau interdit de camper
autour de la plage. Interdiction bien étrange puisque les maisons
sont construites en plein milieu des dunes !
Mais
bon, déjà bien sensibilisé par la fragilité des dunes et de leur
importance dans la préservation du littoral je me résous à planter
la tente dans les taillis ; je serai malgré tout bercé par le
roulis des vagues.
Puis
l'envie de voir l'intérieur des terres me mène à Rocha avec son
théâtre italien.
Je
poursuis par la route 109 ; soixante kilomètres sur une belle
piste qui part à l'assaut des hautes collines et des petites
montagnes tapissées de verts pâturages. La route en balcon propose
de bien belles grimpettes dont les passages les plus hauts se font à
un peu plus de 500 mètres d'altitude. Puis vient la descente en
ligne de crête jusqu'à la petite ville d'Aigua, agréable autour de
sa place centrale et de ses quelques maisons aux couleurs vives.
L'épicier
un peu âgé me tient le crachoir. Il a noté les prix de tous mes
articles sur un bout de papier mais ne se résout pas à faire le
total. Plutôt sympa, mais le problème est que je ne comprends
quasiment pas un traître mot de ce qu'il me raconte. Je pensais m'en
être tiré plutôt bien avec l'accent uruguayen jusqu'alors mais là
je tombe sur un os.
Heureusement
le livreur arrive bientôt. Une conversation à 2,5 s'engage. Je pose
deux trois questions histoire de dire « je suis avec vous les
gars » mais comme l'épicier mène la danse j'ai bien du mal à
suivre la cadence.
J'ai
entendu une histoire de tête (cabeza) coupée à la machette
(machete) mais peut-être n'était-ce que le résumé d'un film
(pelicula) ?? Les quelque mots que j'arrive à capter me font
inventer une conversation qu'il est finalement peut-être préférable
que je ne comprenne pas.
Je
mets fin à ce moment de solitude en arguant le fait que j'ai encore
du chemin, et mon épicier se met en fin à faire la somme de mes
achats.
Et
effectivement il me reste encore du chemin pour gagner le Salto del
Penitente.
Le
final c'est huit kilomètres de piste bien montante qui offre un bien
joli panorama sur les sommets alentour. Depuis la côte l'orage tonne
et se déplace vers la montagne. J'accélère la cadence et arrive à
l'entrée du site au moment où la pluie tombe d'un seul coup. Bon
timing !
Je
suis le seul visiteur. J'avais prévu de camper mais l'orage m'en
dissuade. Je prends un lit au refuge et après le départ des deux
personnes de l'accueil je me retrouve seul dans un grand chalet de
bois avec l'orage qui fait disjoncter le courant et le vent qui fait
claquer les portes. Un poil lugubre tout ça.
Il
est malin cet épicier avec son histoire de machette !
Le
lendemain la pluie ne semble pas vouloir quitter la place. Je rempile
pour une nuit. Cette fois-ci j'aurai de la compagnie ; c'est
samedi et malgré le mauvais temps des familles ont bravé la piste
pour venir jusqu'au parc.
Le
site autour de la chute d'eau est agréable mais ne mérite pas
forcément le détour. Le prix d'entrée de moins d'un euro est
d'ailleurs symbolique. Le parc doit son nom aux deux pierres situées
au dessus du rio qui ressemblent à deux mains jointes en signe de
pénitence.
Ces cinq amies qui y passent la nuit ce soir profitent du feu de
cheminée de la salle commune autour de jeux de société : une
sortie week-end au grand air.
J'ai
bien fait d'attendre ; il fait soleil quand je reprends la route
panoramique pour Minas.
En
entrant dans la ville je subis ma première crevaison, la faute à ce
petit bout de verre.
Minas
offre les mêmes images que les petites villes d'Uruguay.
Pour
rejoindre la côte je prends la route 12 que l'on m'a conseillée au
refuge. Nouvelle route en balcons, mais bitumée cette fois-ci.
Les
rives de la Laguna del Sauce sont occupées par de magnifiques villas
que l'on devine à peine cachées derrière une végétation
luxuriante. Le lac débouche sur le Rio de la Plata. Je laisse vers
l'est Punta del Este qui selon la brochure est l'une des plus belles
stations balnéaires du continent. C'est le lieu de rendez-vous de la
Jet Set de Buenos Aires qui a délaissée les rives argentines de Mar
del Plata depuis que les années péronistes les ont rendues plus
populaires.
Il
ne me reste plus maintenant qu'à glisser vers l'ouest en égrainant
quelques stations balnéaires moins sélectes que Punta, comme
Piriapolis par exemple.
Autre genre à Solis
Je
ne peux malheureusement pas éviter par moments la quatre voies de la
route interbalnéaire, mais j'adopte la zen attitude comme cette
cycliste uruguayenne ; de toute façon la circulation y est
beaucoup moins dense qu'au Brésil.
A
l'approche de Montevideo la côte devient très tôt résidentielle,
puis la capitale se dévoile tranquillement le long de ses remblais
cyclables.
Il
semble qu'il y ait pire endroit pour vivre...
De la côte à l'intérieur des terres les routes d'Uruguay me font voir des paysages finalement bien changeants du Brésil.
Routes
bitumées ou de terre
droite ou sinueuses
plongeant vers la mer
arpentant les sierras ou dévalant les
collines
je n'ai que l'embarras du choix pour découvrir ce petit
pays plein de charmes sur de beaux itinéraires de cyclovoyage.
quel nouveau recit superbe illustré de photos parfaites .je voyage ....grace à Sebb .ce pays est tres tentant .mais vous ne rencontrez pas grand monde mis à part cet epicier et ses reves de machette ???? à la Rochelle vent et pluie sont notre quotidien aussi ces belles plages font rever .demain depart pour 48h dans les landes pour aller dans une vraie belle palombiere et au retour 48h à bordeaux avec mes grands et mes petits .tout le monde vous suit et je vous transmets leurs encouragements et leur amitié.merci encore Sebb et à tres vite bien sur .vos recits me ravissent .jacqueline
RépondreSupprimerLa traversée de l'Uruguay fut assez sauvage avec de nombreux bivouacs et beaucoup moins de monde qu'au Brésil ; les rencontres sont là, souvent brèves à vélo, avec les questions habituelles, d'où je viens... des échanges toujours appréciables de gens qui viennent me voir spontanément.
RépondreSupprimerEnchanteur ce périple !...
RépondreSupprimerOu-vas tu donc traverser l'Atlantique pour arriver à Buenos-Aires ?
Mais ne le dis pas !;;; j'aime bien les surprises qui sont douces à attendre avec quelques jolies photos entre 2 blogs.
Bon courage tout simplement
le mystère est dévoilé : ce sera une liaison ferry depuis Colonia
RépondreSupprimerJe passe et repasse ce fabuleux coucher de soleil qui me fait rêver comparé à ceux de Noirmoutier , je tente ce matin ce petit message après 3 échecs d'hier
RépondreSupprimerCa marche ! la connexion...
RépondreSupprimerJ'avais ressenti que ta traversée de l'Uruguay avait du être apaisante compte tenu des magnifiques paysages ' de routes plus" cool "et à part la pluie / peut-être moins de vent aussi .
Profites un peu de Buenos-Aires et bonne traversée de l'Atlantique demain(que tu auras sans doute l'occasion de "re-cotoyer" ) en descendant vers Ushuaia .
Bises de toute la "maisonnée"
le vent m'a beaucoup poussée en Uruguay, mais se poser quelques jours dans une ville fait du bien à l'organisme
SupprimerBonjour Seb,
RépondreSupprimerA Buenos-Aires, un bonjour au "Petit Prince".
Bon cyclotage.
Philippe à la Géné
c'est amusant : j'ai vu le Petit Prince en espagnol en librairie et ai failli l'acheter ; mais j'ai finalement pris un petit livre de Pablo Neruda.
SupprimerSt Ex en Argentine, ça me rappelle "les ailes du courage" au Futuroscope, une sacrée aventure !
l'argentine!!!! déjà des musiciens en photo .faites nous de belles photos de ce fantastique pays Sebb ,je rève!!! j'ai eu lextreme chance de decouvrir la chasse à la palombe pendant 2jpours dans une superbe palombiere landaise .et ce soir me voila à Buenos aires !!!que de voyage .pourquoi Paulo a t il besoin d'etre reparé ??? où s'est il fait mal??? pas trop grave j'espere .je vous embrasse .jacqueline
RépondreSupprimerpas de souci pour Paulo ; juste la grosse révision des 10 000 km depuis son départ de Paris en février
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