A Oruro, je
décide de revenir en arrière pour avoir un aperçu de ce qui est souvent décrit
comme la plus belle ville du pays, à savoir Sucre.
Je reprends donc
la route 1 sur 30 kilomètres, et tourne à gauche en direction de Huanuni, qui
après 20 kilomètres s’avère être une petite ville minière d’importance lovée au
pied de la sierra.
A l’entrée, un panneau annonce l’arrivée du gaz pour
tous. En attendant, un camion rempli de bombones prévient de sa venue à coups
de klaxons, et les habitants qui en ont besoin échangent leurs bouteilles vides
contre des pleines.
Contrairement à Pulacayo, Huanuni est une ville bien
vivante, avec me dit-on plus de 30 000 habitants. Pas de bowling, mais une salle de
billards et de nombreux petits restaurants, où une fois n’est pas coutume je me
réfugie dans une pizzéria.
Les jeunes Boliviens étant fans de jeux en réseaux, il
m’est en plus facile de trouver des points internet.
La route 6 passe devant les infrastructures minières
puis monte pendant presque 25 kilomètres, d’abord
doucement le long du rio, puis plus franchement pour passer au dessus de la
montagne, m’offrant au sommet une vue d’ensemble sur les difficultés à venir.
S’ensuit une longue descente jusqu’a Llallagua, autre
ville minière bien plus importante.
Paysage du nord, fait de terrils et de corons, mais à
plus de 3500 mètres d’altitude. Les collines artificielles sont ici très
impressionnantes et semblent vouloir rivaliser en hauteur avec les sommets
naturels.
Je loge à une dizaine de kilomètres à Uncia où le
bitume prend fin.
Mais là aussi les pelleteuses sont au travail. La
piste de terre qui part d’Uncia est bien aplanie, et je récupère rapidement une
route asphaltée que ces ouvriers m’autorisent à emprunter.
en quittant Uncia |
Ils s’amuseront entre eux de mes grands pieds. Et
c’est un fait constaté que les sud-américains chaussent petit, car depuis le
nord de l’Argentine, il m’a été pour l’instant impossible de trouver du 45, du
moins dans un design convenable.
Je profite donc du bitume pour moi seul jusqu’à Lagunillas,
posée au bord d’un lac…
… et où la piste de terre reprend ses droits
passage devant une petite mine où les charriots
finissent leur course dans le rio
et arrivée au village animé de Chuqiuta qui semble
perdu au milieu de nulle part
La piste évolue par une succession de montées et de
descentes dans un décor de canyons aux points de vue époustouflants : dure mais
superbe étape de cyclotourisme.
Après les ouvriers en début de journée, ce sont les
métreurs qui me sollicitent pour la photo.
La future route de bitume doit faire au minimum douze
mètres de largeur. Ils posent donc des bornes dans les fossés pour indiquer aux
pelleteuses les endroits où déblayer.
Mais comme la piste que je viens d’emprunter est
parfois large de cinq mètres maximum, il faudra encore quelques années pour
arriver au terme du chantier.
Le camion-stop fonctionne plutôt bien en Bolivie ; 7
bolivianos pour environ 50 kilomètres alors que le bus en demande 10 (1 euro).
Beaucoup de ruraux attendent sur le bord de la route
le passage d’un camion, pour ensuite vendre leur production dans les villes ou
villages : directement du producteur au consommateur.
J’aimerais pouvoir monter les côtes sans m’essouffler
aussi bien que cette gardienne de moutons, qui gravissait cette montagne au
pourcentage ahurissant comme si elle se promenait sur le remblai des Sables
!
Dans les villes, je trouve toujours à me loger pour 3
ou 4 euros, sans ou avec télé. Les toilettes ici existent, mais sans chasse
d’eau. Un réservoir avec une pelle à eau à l’entrée permet l’évacuation. Un peu réticent au
début, c’est plutôt efficace ; juste une technique à prendre.
L’église de Poctoa m’intrigue ce dimanche matin.
Quasiment cachée par des bâtiments qui lui sont postérieurs, je ne l’avais pas
vu en arrivant hier au soir.
Mais ses dimensions sont étonnantes. Je frappe donc à
la porte de la maison paroissiale où on m’annonce une construction du 18ème
siècle. L’intérieur en mauvais état laisse à penser à un long travail de
restauration.
En quittant le village, je fais un bout de chemin avec
Helena. Enseignante à Sucre, elle possède ici quelques terres.
En posant devant le rio qui les irrigue, elle déplore
l’existence des mines d’argent plus haut dans la sierra qui ont contaminé ses
eaux.
Je passe ainsi des villes minières au champs
agricoles. Paysage quasiment plat de pampa qui me mène jusqu’à Macha.
Un peu d’élevage de moutons et de vaches, maïs, blé,
ainsi que de nombreux pêchers que je retrouve partout en vente sous forme de
jus autour des places centrales des villages.
Les canaux d’irrigation permettent l’arrivée de l’eau
directement dans les champs, ce que j’avais déjà observé en Argentine un peu
avant d’arriver à Salta. Techniques ancestrales utilisées par les Quechuas,
dont la langue est d’ailleurs ici beaucoup utilisée.
Macha est adossée au pied de la montagne.
En la voyant de loin, je ne pensais pas que le chemin
qui partait en lacet vers le sommet était la piste pour Ocuri.
La pente sur ce chemin de cailloux est telle que
j’avance une fois moins vite qu’un piéton. Je m’oblige à plusieurs pauses, et
après plus d’une heure de crapahute et moins de 5 kilomètres parcourus, je
décide de bivouaquer dans un abri à moutons.
Le ryhtme n’est guère plus rapide le lendemain. La
route se contente de traverser les vallées : à peine descendu au village situé
au bord du rio qu’il me faut remonter la piste qui gravit la montagne.
Entre Poctoa et
Ocuri, les 65 kilomètres effectués en deux étapes se font à la moyenne record
de 8 km/h !
Et le jour suivant se fait sur le même tempo. Aux
cailloux se mêle le sable, si bien que les descentes se font sur les freins à
moins de 12 à l’heure.
A cette allure j’ai le temps de voir du paysage.
Pas fâché d’arriver à Ravelo, où mon entrée comme dans
les autres vilages ne passe pas inaperçu, avec rires ou sourires et des “eh
gringo” qui fusent.
En entrant le soir dans le petit office de tourisme,
on me propose une visite guidée des alentours avec un guide en apprentissage.
Quand je rentre dans la salle où se tient le cours d’anglais, cinq volontaires
se proposent aussitôt. Me voici donc en balade autour du “Castillo”, forteresse
naturelle qui surplombe le village, avec cinq guides qui me content les
légendes Aymaras ou Incas qui hantent les lieux.
Invité le soir à dîner, j’essaierai de capter quelques
mots de Quecha que les gens parlent naturellement entre eux.
Je ne retiendrai que le mot “pachi”, à savoir merci !
vallée de Ravelo |
La dernière étape commence sur du bitume ; c’est fou
comment un peu d’asphalte facilite la vie, et est un facteur de désenclavement
considérable pour ces régions parfois isolées.
Et quand je retrouve pendant 15 kilomètres une piste
sableuse en travaux aux pourcentages parfois ardus, mon rythme chute quasiment
de moitié.
La descente sur Sucre annonce quelques jours de repos…