A
Chacao, en prenant le bac pour le continent, je quitte Chiloé avec
en tête cette dernière image du « chiliweke », forme
hybride du guanaco, qu'ont domestiqué les premiers habitants
sédentaires de l'île, les Huilliche, un peuple de la famille des
Mapuche.
En
débarquant avec leurs moutons les Espagnols ont peu à peu provoqué
l'extinction du chiliweke. Au fil du temps, Européens et Amérindiens
se sont mélangés pour former un peuple métissé dont les Chilotes
sont aujourd'hui les descendants.
L'artisanat
que les Huilliche avaient développé autour de la laine du chiliweke
fut transféré à la laine du mouton : le métissage culturel
fut donc total pour donner à l'archipel son particularisme qui est
souvent la marque des peuples insulaires.
En
longeant le Golfe d'Ancud vers le nord par les pistes qui relient
entre eux les villages – Colaco, Calbuco, Huelmo – je ne me sens
pas si éloigné de Chiloé, même si le relief moins accidenté me
permet de cycloter plus à mon aise.
golfe d'Ancud
Colaco : coucher de soleil sur l'océan (il y avait longtemps)
C'est l'été indien à Calbuco ; la petite ville se donne de vrais airs de vacances...
Volcans et pisciculture autour de l'anse de Huelmo
L'entrée
à Puerto Montt par son port industriel est par contre un vrai
changement pour la rétine auquel je n'étais plus habitué.
Heureusement
je suis interpellé au marché artisanal du port par un guerrier
Indien plus vrai que nature.
Bon,
quand il me dit qu'il s'appelle Pedro j'ai quelque doute sur son
authenticité. Mais son envie de dynamiter toute la côte urbanisée
de Puerto Montt pour redonner vie à la forêt de ses ancêtres
n'est-elle pas assurément un gage de son appartenance à la lignée
des Mapuche ?
J'ai
bien essayé de poser en Maori faisant le Haka, mais il était
tellement sérieux à jouer son personnage que j'ai un peu raté mon
effet ; mais je me suis bien marré.
Moins
dangereux, et plus sympathique, je croise le troisième cycliste
japonais de mon parcours, ami des deux précédents croisés
auparavant. Il est parti du Japon il y a deux ans pour un tour du
monde ; après l'Asie du sud-est et l'Océanie, le voici en
Amérique, où il compte gagner en juin le nord du Brésil pour voir
jouer le Japon contre la Grèce et la Côte d'Ivoire.
En
attendant il profite de ses pauses pour travailler son swing.
Mais
quand il prend son air de guerrier samouraï domptant le feu,
j'espère qu'il ne croisera pas la route de Pedro : les maisons
de Puerto Montt pourraient en prendre un coup.
Il
utilise un réchaud à bois, mais se sert quand le temps est humide
de son petit réchaud à alcool artisanal, à gauche sur la photo ;
deux fonds de canettes empilées l'une dans l'autre et le tour est
joué.
Pour
gagner un peu de temps il rejoint Santiago par la 4 voies.
Puerto Montt constitue pour moi une halte plus longue.
La
roue arrière fait des bruits étranges ; je la dépose donc à
l'atelier pour un nettoyage en règle du moyeu, qui en a vu de toutes
les couleurs depuis le début du voyage.
Mais
Paulo me fait le coup du panneau français situé avant le
franchissement d'une voie ferrée à double sens en le remaniant à
sa sauce : « attention une crasse peut en cacher une
autre »
En
reprenant le vélo en effet le lendemain il subsiste un bruit, à
peine perceptible, qui vient plutôt de la transmission. C'est donc
parti pour un nouveau nettoyage...
Ayant
pris un peu de retard je réserve une place pour le ferry qui rejoint
Chaiten dans la nuit de jeudi à vendredi ; j'avais prévu à la
base de rejoindre cette ville depuis Castro, à Chiloé, mais la
liaison n'existe qu'en janvier et février.
Il
me reste donc du temps pour visiter Puerto Montt, qui n'offre pas
grand chose à voir. Mais sa position au nord du golfe d'Ancud en
fait malgré tout une étape plutôt agréable.
sculpture du front de mer haute de 6 mètres
église jésuite, 1871
de nombreux Malls parsèment la ville
un chaton très curieux et très joueur
Puerto Montt vaut surtout par ses nombreux parcs naturels qui l'entourent ; c'est donc un peu frustrant de rester consigné en ville.
Prendre son mal en patience avant de reprendre la route vendredi...