Me casser le petit doigt m’aura pris une seconde. Le
guérir cinq mois. Et encore, je ne compte pas le temps de la médication
bolivienne.
Cette trêve d’hiver fut l’occasion de côtoyer le festival
du voyage à vélo de Paris côté jardin, avec la présentation d’un petit montage
de cinq minutes sur mon périple en Patagonie.
J’y ai croisé quelques connaissances de voyage, ainsi que
Jean-Luc, dont son film plein de poésie sur son aventure sud-américaine
précédait le mien.
Puis après la présentation de mon voyage à la maison de
quartier avec le soutien du CSC du Val d’Ornay, j’étais fin prêt pour reprendre
la route, en remerciant auparavant tous ceux venus assister à cette soirée.
J’harnache Paulo avec son poids habituel et quitte la
Vendée par ses sentiers cyclables.
Le marais breton est avec ses hérons, aigrettes,
avocettes, courlis, bécasseaux… un paradis pour ornithologues.
Je tombe mi-mars pendant la période de couvaison des
cigognes blanches. Les œufs sont couvés pendant 32 jours et les parents se
relaient au sommet du perchoir installé par les habitants de Châteauneuf.
pays de Retz |
Avec les palmiers et la brume tropicale on pourrait croire que ce cargo quitte la rade d’un port brésilien.
Mais non. Il s’agit bien, hantée par un crachin local,
d’une plage de Saint-Nazaire, où Hergé fit embarquer ses protagonistes vers le
Temple du Soleil.
Pas d’Amérique cette fois-ci pour moi mais la côte sud de
la Bretagne que je remonte à rythme lent en contournant parfois par le sentier
côtier ses rias, ou ici à Pen Be son traict, baie fermée soumise aux marées
propice à la conchyliculture.
Sur la route les chenilles processionnaires se jouent des
pneus des bagnoles. Ce convoi de 49 individus comportant chacun douze paires de
guiboles se donne les airs d’un très long mille-pattes.
Les défenseurs des pins de Pornichet ont rappelé à la
rescousse les mésanges friandes de cet insecte ravageur pour préserver leur
patrimoine sylvestre.
Vannes contrôle l’entrée du Golfe du Morbihan. J’y entre
après avoir fait le tour de la péninsule de Sené, où le coiffeur du village me
voyant transi de froid à l’abri bus où je pausais pour midi vient m’apporter un
café tout chaud. Réconfortant.
Séné |
Vannes : remparts |
Le quai de la vieille ville d’Auray a été rebaptisé en
l’honneur de Franklin qui venu en bateau depuis son Angleterre négocier à
Nantes une improbable alliance avec la France pour sauver la jeune Amérique en
herbe dut accoster en hâte à Auray à cause d’un mauvais grain et gagner la
capitale des Ducs de Bretagne par voie terrestre.
Le château médiéval, sur l’autre rive, fut lui rasé sous
l’ordre de Henri III pour cause de vétusté.
Il ne reste que se dégage de cette cité un charme suranné.
A Carnac, ce sont les alignements sur plusieurs
kilomètres des mégalithes qui captent l’imagination.à gauche, enceinte du château |
pan de bois : charpente en bois et torchis (argile et paille) |
Il ne reste que se dégage de cette cité un charme suranné.
Ford Torino |
Géant du Manio, 5 fois Paulo, le plus haut de Carnac |
Vieux de 6000 ans selon les archéologues, ou datant de
-50 selon les goscinylogues, les conjectures se perdent sur la signification de
ce site néolithique : sépultures individuelles ou collectives, voire
temples…
Quiberon a gardé la même dichotomie que lors de mon
dernier passage : côte sauvage et déserte balayée par les vents à
l’ouest ; côte plus urbanisée à l’est.
Quiberon, côte sauvage |
La position du sémaphore, au milieu d’un fort entouré de
douves et
éloigné de la côte, étonne.
vue panoramique ... |
Quand je sonne à la vigie, c’est une voix familière et
non surprise qui me répond. Marion me fait visiter le poste de surveillance,
avec le balayage sur l’écran radar des cargos au large de Belle-île qui entrent
ou sortent dans l’estuaire de la Loire.
Ça me rappelle un peu le poste de pilotage de mon
Karaboudjan.
Construits à partir de 1806 sous Napoléon, 58 autres
sémaphores jalonnent désormais les côtes hexagonales.
Leur rôle : appuyer les centres régionaux d’opérations
de surveillance et de sauvetage.
Les guetteurs
sémaphoriques, comme Marion, « sont les yeux et les oreilles des autorités
civiles et militaires. On les surnomme les anges gardiens. »
Et ce n’est pas le nombre de gens sauvés grâce à la
vigilance des guetteurs qui diront le contraire !
Un travail un peu solitaire, qui contraste avec la vie
embarquée, et qui demande une attention de tous les instants.
Un grand merci à Freddy de m’avoir ouvert les portes d’un métier méconnu,
et à bientôt, peut-être, sur les véloroutes …
Je poursuis mon chemin sous le soleil, et continue
d’égrener les villes ou ports bretons.
A Hennebont les bateaux de plaisance se suivent comme des
chenilles, et les chevaux de traits évoquent l’existence d’un haras national.
Lorient fut bien abîmée par la guerre, et la nouvelle
église possède une architecture fort peu bretonne.
Les petits ports de Doëlan et du Belon sont des escales
aussi charmantes que les petites criques ensablées encore peu fréquentées.
Doëlan |
plages de Kerfany |
ria Belon |
Pont-Aven aussi mérite une halte. Les impressionnistes
s’y sont donné rendez-vous, éblouis par la lumière changeante.
La chapelle Trémalo expose quelques copies de Gauguin,
dont le Christ Jaune, exposé aujourd’hui à Buffalo (USA), inspiré par le Christ
en Croix de cette même chapelle.
Gauguin : autoportrait près du Golgotha (1896) |
Le peintre, sur son tableau, le fit sortir de son
sanctuaire, et lui donna un visage plus serein que sur l’original.
Christ Jaune de la chapelle Trémalo ... |
... et celui de Gauguin (1889) |
Concarneau enfin, avec sa ville close, et son quai russe, conclut cette lente chevauchée jusqu’au premier jour du printemps.
pointe de Trévignon |
Concarneau |
quai russe |
Après deux jours de soleil le gris et le froid se
rebiffent pour que l’hiver m’accompagne encore quelques kilomètres.
A vélo toujours, car les chauffeurs de vans ne m'inspirent guère confiance ...
... sans destination véritablement définie ...
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