vendredi 13 septembre 2013

Portugal (2)

Dernière vue sur la mer à Sao Pedro de Moel, puis passage par le marché couvert aux fruits de Marinha Grande où quelques volailles attendent dehors de potentiels acheteurs.




Le monastère de Batalha se trouve bien isolé au milieu de cette ville contemporaine sans fards.
L'église de style manuélin est monumentale, et les deux cloîtres qui la jouxtent donnent encore plus de grandeur à l'édifice. La fontaine située dans un coin apporte une touche elfique digne d'un roman de Tolkien






 
La salle du chapitre sans pilier pour soutenir sa voûte abrite la tombe de deux soldats inconnus portugais héros de la seconde guerre mondiale. La relève des deux gardes se fait avec sérieux sous l'oeil des touristes admiratifs.


Je gagne le soir un peu de fraîcheur dans les contreforts de la Sierra de Candeeiros.

Porto de Mos






Dans la descente vers la plaine le lendemain je pulvérise mon record de vitesse : plus de 70 km/h, toujours sans relances.

 
Rio Maior

 En approchant d'Obedos, les policiers sont à chaque rond-point de plus en plus nombreux. Me surveilleraient-ils au radar ?

Alors que je m'arrête devant ce grand édifice isolé dans la plaine, des motards sirènes hurlantes me font signe de dégager illico du trottoir. Je m'exécute.


Des voitures de polices suivent à toute allure. Bloquerait-on la voie pour le passage d'un convoi présidentiel ?

Et puis non. Tout se raffut pour une simple course cycliste. Je laisse passer les voitures des directeurs sportifs et gagne le village qui est situé au flanc de la colline.


Bâti entre les 13 et 14èmes siècles Obidos est une charmante bourgade médiévale dominée par un château dont certaines églises ont été reconstruites après le tremblement de terre de 1755.


Sur le soir je gagne à nouveau la côte à la presque île de Peniche. Passé le petit quartier au style très italien où le linge sèche au balcon des façades colorées, il faut aller jusqu'au phare et observer au loin l'île de Berlinga tout en se laissant décoiffer par le vent rafraîchissant qui souffle en rafales. Un bon bol d'air !


Nouvelle excursion dans les terres le jour suivant pour aller récupérer un point internet à Torres Vedras.
Après un appel téléphonique à l'agent du port de Lisbonne et un mail, je reçois confirmation que le départ est fixé pour le 14 septembre. Ça me laisse le temps de continuer mon exploration de la côte atlantique.

Le bivouac du soir dans un champ de maïs fauché n'est pas terrible au niveau du sol mais est exceptionnel pour son emplacement face à la mer.
Le soir je suis au spectacle du soleil couchant. Les mouettes ne viennent pas troubler par leurs cris la plénitude de l'instant. Elles se contentent de filer par petits groupes en se laissant dériver par le vent et en glissant juste au dessus de l'astre qui lentement prend son bain.


Matinée de bruine, une fois n'est pas coutume.
La côte autour d'Ericeira abrite parmi les meilleurs spots de surf d'Europe. Complexes et boutiques sont dédiés à ce sport. Mais ce matin, les vagues sont un peu molles.



En entrant à Sintra j'entre sur un terrain déjà foulé auparavant, mais à pied. Je passe donc assez rapidement dans la ville hypertouristique située au pied du Palacio Nacional da Pena, une magnifique excentricité architecturale, et gagne le non moins touristique Cabo da Roca.


Au Portugal, quand on va vers l'ouest, on a toujours l'impression d'être au bout du monde. Le Cabo da Roca ne déroge pas à la règle, surtout qu'une plaque rappelle qu'il est le point le plus occidental de l'Europe.

Le paysage un peu désolé autour du phare construit en 1772, le vent tourbillonnant, la côte tourmentée ... font de cet endroit un arrêt obligé.


Plus intéressante pour moi (et plus calme au niveau circulation) est la montée au monastère de Peninha situé à 490 mètres au dessus de la mer. La petite route forestière qui en permet l'accès est un régal et me fait penser à celle qui me menait en Bulgarie au refuge de Grancar. Que la montagne est belle...
Au sommet je vois Lisbonne. La fin du parcours européen est proche.


La dernière étape pour la capitale est simple. Il me suffit de suivre la côte jusqu'à la tour de Belem qui précède le pont du 25 avril qui enjambe le Tage.

Cascais

monument des découvertes


J'ai profité jusqu'au dernier moment de mes derniers instants de liberté avant de m'enfermer pendant plusieurs jours à bord. Les sept dernières nuits ont été des bivouacs, assez faciles à trouver au Portugal dès lors que l'on s'écarte un peu des sentiers battus.
Mais il est quand même temps de passer à l'épilation.

Jeudi 12 septembre ; le départ approche. Je me rends au port pour repérer le lieu d'embarquement.
Je cherche en vain mon « Karaboudjan* » sur les quais. Mais c'est un autre bateau qui y est amarré attendant son chargement.
Le port de fret de Lisbonne n'est pas très grand, en comparaison de celui de Hambourg où j'avais passer une mauvaise fin de soirée sans en trouver la sortie.


Je me renseigne avec billet à la main pour savoir si mon Karaboudjan est bien prévu pour le 14. L'agent regarde son tableau de bord. Pas de Karaboudjan.
« Normal » finit-il par me dire. « Ici ce sont les départs des paquebots ». Ouf.
Un peu plus loin, on me confirme que mon bateau doit amarrer le 14 et repartir en soirée.

* Karaboudan : nom donné par Hergé au mystérieux cargo du "Crabe aux Pinces d'Or"

Il ne me reste plus aujourd'hui qu'à visiter la capitale, autour des l'avenida Da Liberade, les « Champs-Elysées » lisboètes, ainsi que le long des quais.

pont du 25 avril et Cristo Rei

Rossio

Avenida da Liberdade

Parque Edouard VII

le tram lisboète, incontournable

Praça da Figueira

cathédrale

bord de quai

praça do Comércio


Mosteiro dos Jeronimos

Vendredi 13 septembre ; ce matin je me rends au bureau de l'immigration. C'est l'agent du port qui me l'a ordonné. Je m'exécute.


Le responsable est tout au surpris que moi de me voir dans son bureau.  
« Le Karaboudjan ? Pour samedi ? Et vous êtes Monsieur... ? Et on vous a dit de venir ici ? »
Coup d'oeil interrogatif à ses collègues qui se replongent aussitôt devant leur ordi. Alors il se met à remuer quelques papiers, et en trouve un avec mon nom dessus.
« Ah oui, j'ai votre nom là. Ben, donnez-moi votre passeport » (…) photocopie (…)
« Ben c'est bon pour nous. Demain vous irez directement à l'embarquement. »
Et bien, moi qui m'attendait à passer au gril (…) avec mes motivations pour aller en Amérique du Sud (…) savoir si j'allais pas assister à des camps d'entraînement de guérillas marxistes (…) Ils sont tout aussi contents de se débarrasser de moi.

Je pars donc léger faire le tour à vélo de la baie de Setubal.
Je prends le bus de mer pour traverser le Tage qui se donne ici des airs de grand lac.

Après un crochet par Palmela, 

 je rejoins Setubal avec son sympathique petit port de pêche

 
La plage serait presque paradisiaque s'il n'y avait de gros bateaux qui croisent juste en face. Elle est en tout cas tranquille.



Il faut aller vers l'ouest et entrer dans la Sierra d'Arrabida. Là après avoir pris un peu de hauteur, les anses et les criques de rêve se dévoilent à porter d'oeil. Un régal.




Puis il faut aller encore plus à l'ouest, quitter la montagne, passer le village d'Azéla et arriver dans ce bout de monde qu'est le Cabo Espichel, avec son phare, son monastère à l'abandon du 15ème siècle qui pouvait accueillir de nombreux pèlerins, et sa vue imprenable sur Sintra et la côte lisboète.





Il ne me reste plus qu'à rentrer par la forêt, rejoindre Seixal 

 où je reprends le bus du Tage et arriver à Lisbonne gorgé de belles images de ce Portugal authentique.

Mon périple européen s'achève par cette dernière rando vélo. 
Après l'Amérique. 
Mais demain est un autre jour...












samedi 7 septembre 2013

Portugal (1)

En quittant Santiago, je choisis à nouveau mon itinéraire sans me préoccuper du balisage jaune du camino.
Je retrouve la mer à Pontevedra, puis longe le ria de Vigo. La Galice prend ici des airs méditerranéens. J'ai plus l'impression de longer la Riviera Ligure que la côte atlantique.
Jusqu'à Baiona, il m'est bien difficile de trouver un endroit qui ne soit pas colonisé par l'homme.









Panxon




Puis ça devient plus sauvage, même si des propriétés quasiment posées sur les rochers subsistent ça et là. Une piste cyclable double la route, et c'est trente kilomètres de calme parcourus le matin à l'ombre de la falaise.











C'est là que je rencontre l'étonnant voyageur Joël, un voisin vendéen qui fera l'objet d'un article dans le Journal du Pays yonnais (édition du 12 septembre).

Arrivé à A Guarda, le bac qui devait traverser le Minhos ne travaille pas le lundi. En face, côté portugais, la colline qui surplombe la mer est envahie par une fumée noire. Un hélicoptère canadaire tente d'éteindre l'incendie en puissance. La colline ressemble à un volcan sur le point d'imploser. Les aller-retours de l'hélico vers la mer semblent vains. Déjà quatre morts chez les pompiers m'a dit Joël qui vient du sud.



Je fais un détour de quelques kilomètres et entre finalement au Portugal un peu plus dans les terres.
Là aussi le feu a agi.
A Candemil, après une bonne ascension, l'odeur de brûlé me vient à la sortie du village. Les arbres situés sur la gauche sont calcinés. La route a dû joué le rôle de coup-feu, car la forêt à droite est intacte.



En passant par l'intérieur des terres, je contourne Porto, déjà visitée auparavant. Villes et villages se succèdent sur des routes en montagnes russes.
Braga se visite en montant. Il est midi. Pas de supermarché en vue. J'applique la méthode albanaise. J'achète mon repas dans plusieurs échoppes spécialisées tout en découvrant les différents quartiers. La ville n'a rien d'extraordinaire, mais le centre articulé autour de la cathédrale en fait une halte agréable.


Guimaraes est plus intéressante. Il faut flâner dans ses ruelles, se perdre dans une chaise d'un bar des nombreuses petites praças, s'évader sur un banc d'un parc, découvrir ses monuments historiques ; la façade en azulejo de l'église Sao Francisco me rappelle que je suis bien Portugal.







Le franchissement du Douro, qui se jette quelques kilomètres plus bas à Porto, est impressionnant tellement les versants sont entaillés par l'érosion. Les vignes qui occupent les coteaux de cette vallée célèbre n'ont pas de mal à donner un raisin propice à la fabrication du Porto.
La bien nommée Entre-os-Rios est adossée à la colline située entre le fleuve et son affluent, le rio Tamega.




C'est juste après le Douro que j'ai droit à une magnifique petite route de montagne où un petit lac situé en contrebas aurait pu m'accueillir pour la nuit. 


 Des paysages de basses montagnes se dévoilent de part et d'autre de cet itinéraire utilisant le flanc haut de la colline au milieu de forêt dont certaines ont connu un reboisement récent.


Mais il reste du chemin. Il me faut passer Arouca et ses nombreuses maisons qui tapissent la colline avec leurs vignes, leurs fontaines et leurs potagers.



Pour gagner Coimbra, je quitte à contre cœur cette route à vélo pour la nationale. Le trafic y est intense, mais la traversée de nombreux villages rues ralentit la vitesse des poids lourds.

Je gagne peu à peu un rythme de cyclovoyageur.
Je profite d'une fontaine sur le bord de la route pour laver le linge d'hier grâce à ma bassine miracle.
Je repère dans chaque pays l'enseigne qui me permet d'acheter à prix raisonnables. Ici les « minipreço » me conviennent ; ils disposent pour la plupart d'une large baie vitrée où je laisse le vélo et le surveille de temps à autre de l'intérieur du magasin.

Pour éviter l'autoroute qui prolonge la nationale jusqu'à Coimbra, je prends la N235 pour Luso. Très vite la route se rétrécit au point de ne laisser le passage que pour une seule voiture au village de Monsarros. L'impression de remonter un fleuve jusqu'à sa source, en l'occurrence ici cette fontaine en azulejos que je contemple en m'asseyant sur un banc pendant plusieurs minutes. Est-ce le ras-le-bol de la nationale où les poids lourds me frôlaient parfois de trop près ? Est-ce qu'il est bientôt 4 heures et que le moment de la pause approche ? Est-ce ce message laissé par un certain Gil Pereira qui invite à boire cette eau cristalline que tout le monde ici boit ? La fontaine en azulejos à l'ombre de laquelle mes pensées divaguent me plongent dans une torpeur toute méditerranéenne.
J'attends que la porteuse d'eau en faïence se transforme en personne réelle. Du bruit ? Raté. C'est un Portugais qui vient remplir son bidon.


 Je reprends le vélo pour une ascension vers la ville de Luso et son pont Eiffel et gagne après une nouvelle petite route de montagne en forêt la vallée du Rio Mondego sur laquelle veille la ville aux maisons blanches de Penacova. Après une fin d'étape comme celle-ci, le bivouac est de mise !


Penacova

rio Mondego




La vallée du Mondego le lendemain matin me fait penser à une rivière de Dordogne avec ses versants couverts de forêts pentues.



J'arrive finalement à Coimbra. Ville haute, ville basse. Ville basse avec ses ruelles commerçantes et piétonnières ; ville haute avec sa prestigieuse Université où les étudiants qui discutent sur la place du bâtiment principal me font entrer avec leurs tenues de sorciers dans le monde de Poudlard !






Pour quitter la ville, il me faut reprendre la nationale. Mais cette fois-ci c'en est trop. Je jette l'éponge au bout de dix kilomètres. Direction la mer.

marre des bagnoles !

Bonne inspiration. La circulation automobile s'anéantit à partir du moment où je file vers l'ouest par les chemins de traverse. Les cigognes m'accompagnent, et comble de bonheur je récupère une piste cyclable droite plate et en forêt qui longe l'océan. Retour sur la vélodyssée.
Je trouve même un lac qui longe l'océan. Mais pas de skieurs nautiques à filmer.




Drapeau rouge sur la plage de Pedrogao ; ça n'incite pas à la baignade.
Le soir ce sont les pêcheurs qui s'alignent face à une mer houleuse.