Mettre Paulo dans un bus ; voilà bien la dernière des
extrémités à laquelle j’aurais aimé être confronté.
J’arrive à la gare à l’heure que l’on m’avait
conseillée, mais vue la gueule que me tire le bagagiste, j’aurais dû anticiper. Mais bon, avec un peu de
bonne volonté, le vélo trouve sa place bien comme il faut à l’arrière du bahut.
Je n’ai jamais réussi à bien dormir dans un bus,
celui-ci ne déroge pas à la règle. L’itinéraire suit des villes déjà visitées
auparavant, dont Potosi et Oruro, avant de gagner El Alto, la ville banlieue de
l’altiplano qui domine La Paz.
J’atterris à la casa de ciclistas tenue par Cristian où
je vais passer plus d’une quinzaine de jours en attendant la guérison du doigt.
Ce couple d’Anglais, Matt et Anna, m’y accueille avant
de reprendre leur route vers le sud le lendemain.
La Paz est une ville toute en hauteur, de 4000 mètres
à El Alto avec ses quartiers populaires, à 3000 mètres en bas de la vallée
avec ses maisons chic.
Comme à Sucre, je déambule dans la ville au gré de mes
envies en découvrant ses monuments qui s’étirent de part et d’autre de l’avenue
principale.
monastère San Francisco... |
plaza Murillo |
calle Jaen |
La Paz offre de nombreux miradors, de jour…
…ou de nuit
Le colis qui m’attendait prématurément à Santiago se
trouve dans le bon tempo à La Paz, et vient finalement à point nommé pour
couronner cette année de voyage !
Quelques randonnés sur un ou deux jours permettent de
s’échapper un peu du centre…
la vallée de La Luna, avec ses étranges formations géologiques... |
passage devant le zoo de Mallasa et ses condors des Andes... |
... avant de profiter d'une belle vue sur la vallée située plus en aval |
La virée au bord du lac Titicaca ne se passe vraiment
comme prévue.
Pour gagner Copacabana, le bus traverse seul cette
partie du lac tandis que les passagers utilisent une autre petite embarcation.
Mais sur l’autre rive, alors qu’on est toujours en
Bolivie, un fonctionnaire des douanes contrôle l’identité de quelques
passagers.
Comme je suis le dernier à quitter le bateau, et que j’ai
pris mon temps pour quelques photos du lac, je me retrouve seul devant lui ; je
présente la photocopie de mon passeport, qui s’avère inutile pour espérer continuer
ma route.
“Sans le passeport original, vous devez retourner à La
Paz !”
“…”
Il demande au chauffeur du bus de sortir mon sac à dos
de la soute et me laisse sur le bord du trottoir alors que le bus poursuit sa
route sans moi vers l’Isla del Sol.
Enervement de ma part (car un simple coup de fil à La
Paz aurait permis de contrôler la régularité de ma situation) ; réaction du
fonctionnaire qui me menace de m’expulser si je n’obtempère pas à ses ordres ;
signature d’un carnet où mon nom apparaît après un liste de nombreux autres
infortunés voyageurs qui comme moi ont du rebrousser chemin ; retour sur l’autres rive … c’est fou comment
la décision d’une petite autorité perdue au milieu d’un nul part bolivien peut
vous gâcher l’existence !
Je suis venu marcher pour trois jours, alors je marcherai
! Je reprends à l’envers le trajet utilisé par le bus en longeant à pied de
plus ou moins loin la partie sud du lago, en ayant cette fois-ci tout le temps
d’admirer le paysage…
J’aurai également droit à mon bivouac au bord du
Titicaca
et arrêterai ma randonnée le deuxième jour dans ce
petit village
non pas que j’en avais assez de marcher, mais parce qu’un
chien sans doute de mèche avec le fonctionnaire de la veille décida de prendre
le bas de ma cuisse pour un morceau de gigot.
Je décide donc d’arrêter les frais et arrête un micro
pour La Paz après avoir nettoyé la plaie.
Mon vaccin anti-rabbique reçu avant le départ doit
être renforcé grâce à l’injection de deux doses supplémentaires espacées de
trois jours.
Je contacte le docteur Parent de l’ambassade de France
qui se procure en deux jours le vaccin de l’institut Pasteur.
Je trompe l’attente à la casa de ciclistas en
compagnie de Paul, un Français qui achève à Lima un tour du monde en vélo
couché après être passé par l’Asie, et ce couple de retraités canadiens, Jeff
et Roz, qui ont démarré leur périple depuis la capitale péruvienne.
Roz porte en bas du genou un tatouage avec le nom du
blog, “shift happens”, qui se traduit par “un changement peut arriver”, ce qui
résume finalement assez bien un voyage à vélo.
J’effectue ce mardi matin la radio de contrôle de l’auriculaire,
qui s’avère décevante : les os ne sont pas recollés.
Une première semaine d’attente supplémentaire pour
ôter une première broche ; puis pause d’une atèle à garder pendant 15 jours
pour espérer une guérison plus rapide ; sans garantie d’ailleurs de réussite ;
et puis de la rééducation derrière … pas près de retourner sur le vélo.
L’éventualité d’un retour prématuré, dernière option
non souhaitée, commence à prendre sur un camembert figuratif des différentes
alternatives qui s’offrent à moi pour la continuité de ce voyage un pourcentage
de plus en plus conséquent … shit really happens !
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