jeudi 24 avril 2014

vallée centrale

Je quitte Villarica sous le soleil, avec cette fois-ci une vue dégagée sur le volcan éponyme actif, dont quelques agences de la ville proposent une excursion du cratère à la journée.



Sur l'autre rive du lac c'est le volcan Llaima, plus éloigné, qui montre son sommet enneigé.


Je rejoins désormais un itinéraire plus plat, autour de vallées consacrées à la culture de vergers, et dont les petits centres urbains autour de leur plaza de armas toujours bien entretenue vivent de l'activité des marchés locaux.

Freire




Collipulli


Angol








Temuco est plus industrielle. Le musée sur les cultures indigènes montre le syncrétisme qui eut lieu entre les Mapuche et les colons européens après de nombreux conflits souvent sanguinaires.




J'y passe pendant le week-end de Pâques (Semana Santa) qui se déroule du vendredi au dimanche. L'occasion de flâner autour du mercado central plutôt encombré, car seul lieu ouvert de la ville avec le Mall.


J'y croise Eduardo qui intrigué par Paulo est content d'apprendre que son propriétaire est français. C'est un joueur d'accordéon fan de Paris qui me supplie de l'entendre jouer quelques airs avant que je quitte Temuco.
  • Mais si, mais si, j'habite à deux pas.

Quelques (plusieurs !) cuadras plus tard, voici Eduardo qui débarque sur la place du stadium avec son antique accordéon et son béret de Paris dont l'étiquette assure de son authenticité : « 100% pur laine ; fabriqué en France ».
Comme il ne veut pas que je le prenne en photo, je troque ma casquette pour le béret et pose fièrement avec en main l'accordéon dont je ne saurais sortir aucun son.


Je trouve comme reliques de France mon vieux porte-monnaie en cuir de Barèges avec quelques timbres français qui feront son bonheur.

Sur la 4 voies qui me fait quitter la ville sur le tard par sa zone industrielle, je ne peux m'empêcher d'entonner des airs de musette qui auront égayé la fin de mon après-midi.
Comme j'allais entamer un énième couplet de « ah le petit vin blanc », un petit champ avec vue sur le volcan à côté d'une entreprise vide de travailleurs en ce samedi soir me sert de dortoir pour la nuit.



Je poursuis le lendemain le long de cette autoroute avec le vent favorable.

Los Angeles est bien chilienne, mais est plus modeste que son homonyme du nord.
Arrêt obligé au café francés, tenu par Benoît, un vendéen originaire de Chavagnes qui est venu vivre de ce côté de la cordillère andine.


Je tombe un peu pendant le coup de feu, ce qui me permet malgré tout de savourer le menu du jour accompagné d'une petite sauce qui rendra mes prochains repas du soir encore plus fades que d'habitude.

En attendant que le café se désemplisse je fais une petite visite de la ville, avec son incontournable Mall, et son grand marché aux fruits qui déborde un peu sur les routes adjacentes et où l'on trouve de tout.




Retour au café avant de repartir et dire au revoir à Benoît en lui souhaitant bonne continuation ; tout client vendéen se verra offrir une ristourne de 50%, alors si vous êtes au Chili, n'hésitez pas le détour par Los Angeles !

Passage par les chutes del Laja, hautes de 35 mètres, qui sont sans doute plus impressionnantes après un passage pluvieux



puis arrivée à Chillan, dont la cathédrale moderne constitue la carte postale de la ville


cet ensemble religieux de style gothique espagnol a beaucoup souffert du terrible tremblement de terre de 1939



Après avoir retrouvé plus de chaleur et de soleil autour de cette vallée centrale plate et balayée par un petit vent du sud, je poursuis ma route, vers le nord toujours...

 







jeudi 17 avril 2014

rutas de los lagos

La route 40 part en faux-plat à l'assaut d'un col qui m'occupera quasiment toute la journée. Contrairement à la route 3 qui comptait les kilomètres du nord au sud, la 40 s'écoule du sud vers le nord. Je démarre l'étape autour du kilomètre 1915, et vais ainsi à chaque kilomètre remonter une année du 20ème siècle.

Les années folles donc à El Bolson


Cette belle cascade à midi, à l'époque du Front Populaire … ça sent les vacances.


En 1974, il ne me reste plus grand chose à monter … je me sens renaître


La descente s'amorce dans les années 1990, et la nuit au bord d'un lac se fait au début du 21ème siècle.






Je gagne San Carlos de Bariloche le lendemain à midi. Cette ville touristique vit surtout l'été de sa position au bord du lac Nahuel Huapi, et l'hiver autour du Cerro Catedral et de ses pistes réputées.
Il y a du monde malgré tout en cette journée d'automne, où la photo souvenir aux côtés d'un Saint Bernard est assez courue sur la place de la mairie.

Cerro Catedral








Je repars aussitôt mangé car le temps est au soleil : le vent qui me pousse jusqu'alors a chassé les nuages.
Petit arrêt à la gare ferroviaire, assez rare en Amérique du Sud, où l'unique train assure la liaison une fois par semaine avec Viedma, à l'autre bout de la Région, où je suis passé en novembre dernier.



Je quitte la ville dans le futur, en 2047, mais avec le vent d'ouest que je récupère en pleine face en longeant la rive nord du lac, j'ai bien l'impression de revenir aux pires heures des journées venteuses de la route 3.
Le bivouac après dix kilomètres à l'abri de ces quelques arbustes est finalement le bienvenu.





J'opte le lendemain matin pour un départ matinal. Mais Eole ne dort pas de la nuit, et je reprends la route dans les mêmes conditions que la veille. Peu à peu pourtant le vent finit par céder pour laisser la place … à la pluie qui ne me lâchera pas pendant deux jours.



L'occasion de faire une pause dans la petite station plutôt chic de Villa la Angostura où le Cerro Bayo, avec son petit domaine skiable, attire de nombreux Brésiliens l'hiver qui fuient la trop fréquentée Bariloche.








architecture de pierre et de bois, typique de la région, pour cette petite chapelle également




chemin de croix très stylisé et intérieur très sobre 



 

Quand je reprends le vélo c'est pour partir à l'assaut de la « route des sept lacs ». Il fait froid, soleil et sec : le temps idéal pour un tel itinéraire.

J'en termine d'abord avec la rive nord du Nahuel Huapi qui se montre resplendissante sous le soleil.



Bain de fraîcheur au lago Espejo avec une plongée vers une plage verglacée.



Ce sont les arbres qui ont blanchi pendant la nuit autour du lac Correntoso.



Après une bonne montée, puis un passage de 15 kilomètres sur une piste de terre qui dans quelques mois n'existera plus, la route 40 plonge vers le lago Villarino, dont la rive Est constitue le seul endroit de cet itinéraire pour camper librement. Mais quel lieu incroyable.





Je m'installe donc pour la nuit, en attendant le spectacle du soleil couchant sur le lac.

à l'ouest le lago Villarino
 à l'est le Cerro Buque


Mais c'est à l'Est que mon regard se tourne bientôt. La lune s'élève lentement au dessus du Cerro Buque alors que son étoile s'éteint peu à peu à l'Ouest. Un jeu de lumière s'improvise alors au sommet de la montagne, qui en quelques secondes seulement passe d'une couleur à l'autre, pour finalement se figer dans un spectre blanchâtre tout hivernal.









Quand le soleil se lève sur cette même montagne le lendemain, il a bien du mal à percer le sortilège que lui a infligé la lune.





Le trajet perd alors un peu de son éclat, même si le lago Machonico lui donne une teinte plus automnale.


Il ne me reste plus qu'alors à rejoindre le lago Lacar après une descente de 15 kilomètres toute en virages au terme de laquelle je finirai glacé, un peu comme ce vieux lapin aveugle croisé plus haut, qui restait prostré à un mètre de la route dans le vain espoir d'un rayon de soleil pour le réchauffer ; j'ai d'ailleurs bien cru qu'il était mort congelé !





San Martin de los Andes, avec son architecture typique de montagne, au pied du lac, est également une destination de vacances d'hiver très prisée.




Une longue descente en faux-plat me mène à Junin de los Andes, la capitale nationale de la pêche à la mouche.


Son église moderne luxueuse détonne avec ses vitraux représentant des scènes de la vie des Amérindiens.




Mes derniers tours de roue dans cette partie de l'Argentine se font autour du volcan Lanin, dont le cône toujours blanc à la forme parfaite est comme un phare guidant le cycliste vers la frontière.







Le volcan est éteint ; la fumée n'est ici qu'un nuage


Tiens, un voleur de chaussures




La douane chilienne est ici très pointilleuse : toutes les sacoches devront passer au détecteur de fruits.
Une longue descente de 70 kilomètres qui serpente au milieu de nombreuses sources thermales reconverties en cures de luxe me conduit tout schuss à Pucon, au bord du lac Villarica, le dernier de ce parcours.






Etonnante succession d'étapes, qui n'ont eu cesse d'alterner entre villes parfois très sélectes et lacs quasiment sauvages, le tout chapeauté par un volcan culminant à plus de 3700 mètres.

Je ne rencontre plus de cyclistes depuis mon samouraï de Puerto Montt, mais beaucoup de motards, dont la moitié descendent encore vers le sud et le froid, comme le Brésilien Marco croisé au pied du Lanin.